La Cour Constitutionnelle vient de donner raison à la ministre de la santé en rejetant l’ensemble des recours contre sa loi sur la psychothérapie.
Si cette décision peut paraitre heureuse pour les uns et déplorable pour les autres elle montre aussi une démarcation claire entre deux visions de la psychothérapie et, partant, deux visions de la société.
La loi sur la psychothérapie promue par la ministre Maggie De Block est entrée en vigueur en septembre 2016.
De nombreuses voix opposées à cette vision réductrice et normalisante du métier se sont élevées et plusieurs recours devant la Cour constitutionnelle ont été déposés.
Un premier recours a permis aux professionnels qui pratiquaient - sans entrer dans les conditions requises par la nouvelle loi - de poursuivre leur pratique si elle est antérieure au 1er septembre 2016 et ceci tant que le gouvernement ne propose pas de nouvelles mesures transitoires moins discriminantes.
Plusieurs autres recours ont ensuite été engagés visant l’annulation complète de la loi.
Ces recours portés par de nombreuses associations et des centaines de psychothérapeutes viennent d’être rejeté par la Cour le 1er mars 2018.
Si cette décision reste déplorable elle clarifie la situation.
La décision de la Cour permet donc à la ministre de poursuivre l’installation d’un système de soin qui privilégie l’économie et la standardisation des soins.
Une ligne de démarcation plus précise apparait dès lors entre deux visions radicalement différentes de l’accompagnement des difficultés psychologiques.
La première, désormais reconnue comme "officielle", est ancrée dans une vision "techno-médicale" où la souffrance et les difficultés psychologiques sont considérés comme des dysfonctionnements qu’il convient de traiter suivant la triade symptôme -> diagnostic -> traitement.
La seconde approche ancre sa pratique dans un champ plus large de la relation d’aide qui privilégie la singularité de chacun et refuse de réduire les difficultés, questions et souffrances psychologiques à des troubles de fonctionnement qu’il faut "traiter".
Malgré ce que certains soutiennent il n’y a pas - par rapport à ces deux visions - d’un côté ceux qui seraient qualifiés pour pratiquer légalement et de l’autre ceux qui ne le seraient pas. Le débat se porte en réalité aujourd’hui sur la volonté ou non d’inscrire sa pratique dans le cadre et le modèle imposé par le gouvernement en matière d’accompagnement psychologique. Et ceci quelles que soient les formations des praticiens.
Dans l’avenir, le public devra pouvoir comprendre plus clairement à quel type de professionnel il souhaite s’adresser.
Pour bien comprendre les enjeux de la loi, le Collectif Alter-Psy, particulièrement engagé et actif dans ce combat, a publié deux articles de synthèse sur son site.
Le premier fait suite à une rencontre organisée le soir même de l’arrêt de Cour Constitutionnelle. Il propose une première analyse de la situation. (Lire l’article)
Le deuxième présente le contexte, l’histoire et les perspectives pour le futur de la psychothérapie. (Lire l’article)
Un nombre important de psychothérapeutes professionnels - pour la plupart pourtant dûment autorisés à poursuivre la pratique de la psychothérapie - envisagent de se démarquer du cadre voulu par la ministre de la santé.
La question n’est donc plus de savoir qui est autorisé à pratiquer la psychothérapie mais qui sont ceux qui souhaitent, ou non, pratiquer la psychothérapie telle que définie et cadrée par la nouvelle loi.
Benoît Dumont est psychothérapeute à Bruxelles - Uccle (également consultations en ligne). Il est titulaire du Certificat Européen de Psychothérapie (CEP) délivré par l’Association Européenne de Psychothérapie (AEP), il est membre de l’Association Belge de Psychothérapie (ABP/BVP) et membre fondateur du collectif Alter-Psy.
Il est aussi le responsable éditorial de Mieux-Etre.org
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