Qui est « Je » lorsque je parle ? Cette question Paul Ricoeur l’a explorée dans « Soi-même comme un autre » et pose la question cruciale de l’identité.
Est-ce bien moi qui agis lorsque je pose une action, un choix ou suis-je agi par des influences intégrées, mais non conscientes ? Comment qui je suis traverse-t-il le temps ? Quelle est sa permanence et dès lors sa consistance ?
Ne suis-je donc vraiment que poussière qui retournera à la poussière, ne suis-je qu’un souffle qui passe ?
Et qui est Juliette « tombée » en burn-out ?
Paul Ricoeur met en évidence deux dimensions de l’identité : l’idem qui répond à la question du « Quoi » : qu’ai-je fait qui me constitue et comment l’ai-je réalisé. Il s’agit de l’identité façonnée par l’agir et le contexte dans lequel cet agir se déroule. Ricoeur nomme la deuxième dimension : l’ipse, c’est la dimension qui répond à la question du « Qui » de l’existence. Qui suis-je vraiment sous les masques des conventions ?
Chacun traverse le temps avec une permanence à soi à la fois subie dans l’idem et voulue dans l’ipse. Comprendre cette binaire tension et dire qui l’on est, c’est, en fait, émettre une interprétation de soi. Cette interprétation est façonnée par une mise en récit de soi. Lorsqu’on se raconte, on est toujours le personnage principal du récit, le « héros ». Lorsqu’on se raconte, on adopte un angle de vue à partir duquel on se raconte. Nos narrations nécessitent une certaine scénarisation, une mise en scène guidée par une intrigue, qui rassemble des éléments choisis de notre vie (il est impossible de tout dire de soi). Cet assemblage n’est pas la réalité vécue, mais bien la réalité racontée d’une vie. C’est dans ce sens que notre identité est narrative. Et donc si elle est narrative, d’autres points de scénarisation sont possibles, d’autres éléments, d’autres « morceaux de vie » peuvent entourer le héros. Le contexte dans lequel nous agissons et dans lequel nous nous racontons est bien souvent dessiné par les discours dominants de la société ou de notre famille. « Tu as un bon emploi, il faut à tout prix le garder » disait la mère de Juliette dès qu’elle se plaignait à sa mère de l’oppression qu’elle sentait dans son environnement de travail. « Bon emploi – bon salaire - belle situation », voilà un discours qui avait sans doute tout son sens à une époque donnée, pour la mère de Juliette peut-être, mais Juliette, elle, est « tombée » en burn-out comme on dit, elle est passée de l’identité « je suis dans une bonne situation » à « je suis chômeuse ». Conclusion identitaire réductrice, grand écart qui fait mal. Comment dès lors, lorsqu’il y a rupture identitaire concilier l’ipse et l’idem de notre être ?
Au fil des conversations narratives, on cherche à déconstruire le discours dominant « bonne situation » : quelle signification la société place derrière cette étiquette, la maman de Juliette, et Juliette elle-même ?
Dans les conversations de re-authoring, le praticien narratif et son client (ici Juliette) vont décortiquer, déconstruire, remettre le problème « je suis chômeuse » à sa place, c’est-à-dire en dehors de l’identité de Juliette.
Juliette n’est pas chômeuse à 100%, elle bénéficie, pour le moment, des indemnités du chômage. Juliette est bien autre chose que « chômeuse ».
Lors de ces conversations, ce sont ces fils identitaires nouveaux, fragiles, qui sont animés, consolidés, épaissis pour que Juliette puisse s’ancrer dans un terreau qui lui permet de faire pousser ses projets. De fines traces d’une histoire préférée commencent à se tisser.
Juliette reparle de ses réjouissances dans son enfance, non pas pour apporter des éléments à une pseudo-psychanalyse mais pour se replonger dans une sensation, des pensées, des sentiments porteurs de sens. Elle se souvient qu’elle aimait se retrouver, seule, dans des livres des heures durant.
Dans la pratique narrative des Réveilleurs d’histoires, le passage de la parole à l’écriture n’est pas rare. La conversation entre le praticien et son client permet à ce dernier de prendre la plume pour se raconter.
Alors c’est en écrivant que Juliette écrit, s’écrit, joue avec son histoire, en explore tous les sens et le désir de continuer à suivre celui qui coule de source apparaît. Juliette se remémore les moments intenses et joyeux de son expérience professionnelle, elle capte ces « morceaux de vie », les isole, les fait grandir et découvre que les moments de réflexion en petits groupes lui apportaient bien plus de satisfaction que les moments où elle devait parler en public et promouvoir les produits de sa compagnie. Juliette n’est plus à 100% chômeuse, Juliette est compétente en écriture, est capable de réfléchir et discuter sur des sujets de fond et bien d’autres. Le subi et le voulu se détachent l’un de l’autre, les contours de l’idem et de l’ipse apparaissent en même temps que le brouillard devant les yeux de Juliette se dissipe. Les conversations narratives font traverser Juliette par la prise de conscience de ses ressources de vie et les morceaux de vie choisis et alignés dans l’écriture refondent un récit de soi plus heureux.
La question identitaire est au cœur de l’Approche narrative. C’est pourquoi au cours des conversations narratives, il importe de voyager entre les divers paysages identitaires de la personne accompagnée : ses actions, ses relations, ses valeurs. L’ipse de la personne est ainsi mise en lumière et le récit de vie, le travail de raconter des « morceaux de vie choisies » aide la personne à asseoir son « identité préférée » pour l’avenir.
Le coaching narratif permet de traverser des questions identitaires comme le vieillissement, la transition professionnelle (par exemple après un burn-out) ou encore la rupture amoureuse.
Et vous,
à quel discours dominant souhaitez-vous échapper ?
Quelle est votre identité préférée ?
Quel morceau d’histoire vécue désirez-vous honorer ?
Les Réveilleurs d’histoires accompagnent les personnes et les groupes en transition en déclenchant un autre imaginaire narratif, plus porteur de sens et constitutif d’une histoire, d’une identité « préférée ».
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