Enseignants, contrôleurs aériens, infirmières, policiers, commerciaux, … : si le stress touche particulièrement certains métiers, chacun peut en être victime, quel que soit son milieu professionnel. Il est aujourd’hui la première cause de souffrance psychologique au travail. Frustrations, surcharge de travail, manque de communication entre le management et la base, harcèlement moral, angoisse de la performance, etc… : les sources de stress augmentent chaque jour, et ce, malgré la réduction du temps de travail et les progrès technologiques, censés améliorer notre quotidien. La vie professionnelle n’est pas seule affectée : dans les familles, à l’école, la pression du monde extérieur, les exigences de performances génèrent de plus en plus de stress.
Plus psychologique que physique, le stress est devenu une véritable épidémie : troubles du sommeil, maux de dos, anxiété, dépression, voire suicide, il met en péril la santé physique et mentale des individus et coûte cher, aussi bien aux entreprises qu’à l’économie mondiale. Il y a 40 ans, le mot "stress" était à peine connu. Il atteint aujourd’hui une telle ampleur qu’on l’associe communément à la vie moderne. Il est le lot quotidien d’une majorité de travailleurs, mais il atteint également les enfants, les adolescents et les personnes âgées. Selon l’American Institute of Stress, il est à l’origine de 75 à 90% des nouvelles consultations médicales et de 60 à 80% des accidents de travail. Le Bureau International du Travail en a fait une de ses préoccupations majeure. Les coûts du stress - dus à l’absentéisme, à la perte de productivité, aux rotations de personnel, aux accidents, aux frais médicaux et légaux directs, ainsi que d’assurances et de compensations - seraient plus élevés que ceux de toutes les grèves réunies. Et cette situation ne fait que s’aggraver d’année en année.
Le stress est une réponse de l’organisme aux facteurs d’agressions physiologiques et psychologiques, ainsi qu’aux émotions qui nécessitent une adaptation.
Il est important de différencier l’anxiété du stress. L’anxiété et le stress se situent à deux niveaux différents. L’anxiété est une émotion. Le stress fait toujours référence à une situation dans laquelle on se trouve et qui nous oblige à nous adapter, mais il ne peut être réduit à une émotion. En revanche, le stress produit presque toujours des émotions, parmi lesquelles se trouve l’anxiété, au même titre que la joie ou la tristesse. Par exemple, le pilote de ligne qui atterrit est stressé à cause de sa responsabilité à l’égard des passagers, mais il n’est pas anxieux car il maîtrise la technique. Quand la cause du stress cesse, la réaction de stress disparaît. Par contre, une personne anxieuse au travail continue à ressentir des manifestations d’inquiétude ou de tension à la maison, le week-end.
Pour mieux comprendre ce qui se passe, précisons qu’avant d’être l’ennemi public numéro un, le stress a été un facteur déterminant pour la survie de l’espèce. En stimulant certaines fonctions de notre organisme (rythme cardiaque, respiratoire, contractions musculaires...) et en inhibant d’autres, comme la digestion, il permet avant tout une grande libération d’énergie qui, en cas de danger imminent, permet de réagir immédiatement. C’est la fameuse réponse de "fuite ou combat", bien utile aux temps les plus reculés de l’humanité. Ce dernier comporte deux mécanismes, l’un stimulant, qui met le corps en alerte, c’est le système orthosympathique, équilibré par le système parasympathique, modérateur, qui détend et calme l’organisme. En outre, le système nerveux autonome est en quelque sorte "doublé" par le système endocrinien (glandes surrénales, thyroïde, hypophyse, pancréas, ...) où les messages d’incitation et de modération sont transmis non plus par influx nerveux, mais par des sécrétions hormonales (catécholamines : adrénaline et noradrénaline, acétylcholine...).
Le problème est que cette réponse archaïque n’est plus adaptée à nos conditions de vie actuelles. Ce que nous affrontons au quotidien (problèmes familiaux, professionnels, rythme de vie...) ne menace que rarement notre vie mais nous pousse plus à la négociation qu’au combat. D’où conflit inévitable entre notre cerveau archaïque, qui nous prépare à nous battre, alors que notre raison nous incite à nous calmer. Cette dernière l’emporte souvent mais n’a malheureusement pas toujours le pouvoir d’agir en amont, en arrêtant la cascade des hormones de stress. Elle arrive à réprimer le passage à l’acte, mais pas la production d’adrénaline. Cette énergie libérée et inemployée n’a souvent pas d’autre issue que de se retourner contre nous et de provoquer une série de symptômes pathologiques.
On ne peut plus ignorer le stress ou simplement le tolérer en attendant que la situation devienne moins exigeante. Les pressions ne disparaîtront pas : elles font partie de la vie quotidienne "normale". Il faut maintenant apprendre à "gérer notre stress".
Fort bien, mais comment gérer ce stress qui est pratiquement omniprésent dans notre vie moderne ? Pour certains, il suffit, pour y échapper, d’en supprimer les sources potentielles ; c’est bien entendu incompatible avec le contexte de vie socioprofessionnelle actuel. D’autres traitent chimiquement les symptômes du stress par la prise de médicaments psychotropes. Dans les cas d’urgence, la prise d’anxiolytiques, par exemple, peut être d’une aide momentanée très efficace mais il faut alors gérer les effets secondaires d’un médicament qui coûte cher à la société et qui cesse ses effets dès qu’on arrête de le prendre. La dépendance aux médicaments - et particulièrement aux psychotropes - est loin d’être un phénomène anodin dans nos sociétés modernes.
La meilleure approche, celle qui respecte le mieux l’écologie humaine, c’est l’acquisition de comportements psycho-physiologiques qui permettent soit de faire barrage à la pression du monde extérieur, soit de mieux répondre à cette pression.
Les techniques de détente constituent des outils thérapeutiques capables de contrecarrer plusieurs des processus biologiques liés au stress qui mènent à la maladie. Ces techniques sont également utiles pour réparer les dommages déjà causés à l’organisme par les stress répétés.
De nombreuses méthodes de relaxation ont été développées et il n’est pas de mon propos de les reprendre ici. Ces techniques ont toutes leurs avantages intrinsèques et sont généralement efficaces… si on continue à les appliquer.
Le problème se situe justement là : généralement apprises avec enthousiasme lors d’un séminaire, d’un cours, d’une formation ou par soi-même, ces techniques tombent souvent dans l’oubli après un temps relativement court si elles n’ont pas été intégrées dans l’économie psycho-physiologique de l’individu. En d’autres termes, il est nécessaire que la technique apprise acquière le statut de réflexe et que sa mise en œuvre soit initialisée, de façon régulière, par l’activité mentale inconsciente et non pas vécue comme un "devoir" ou une tâche fastidieuse.
On peut en effet affirmer que le principal obstacle à la gestion du stress consiste non dans l’apprentissage d’une méthode de détente ou de relaxation, mais plutôt dans l’intégration de celle-ci dans l’économie psycho-physiologique de l’individu.
Au niveau du système nerveux, l’intégration implique la création d’un réseau neuronal suffisamment efficace pour être facilement activé et fonctionner ensuite "en roue libre", en produisant ses effets bénéfiques sur l’organisme.
Quelles sont les conditions nécessaires pour qu’un apprentissage s’intègre rapidement et avec succès dans le système psycho-physiologique de l’individu ?
Tout d’abord, la technique doit être simple à mettre en œuvre et ne pas exiger trop de temps (quelques minutes seulement). Il est évident que disposer d’une heure devant soi pour faire une séance de yoga dans le calme est extrêmement bénéfique pour l’organisme, mais qui peut se permettre d’inclure une séance de yoga dans sa journée de travail ? Par contre, il est à la portée de chacun - dans le train, à l’atelier, devant son ordinateur ou au volant de sa voiture dans un embouteillage - de pratiquer quelques minutes une respiration amplifiée, associée à de la visualisation.
Il faut ensuite qu’une sensation de bien-être soit immédiatement perçue pendant l’exercice. Le ressenti de bien-être sera alors inscrit dans ce qu’il est convenu d’appeler la mémoire d’état de l’organisme.
La technique doit également être pratiquée au moins une fois par jour, durant une période de repos des rythmes ultradiens. Les rythmes ultradiens, tels que décrits par Ernest Rossi, sont la succession continue de périodes d’activité biologique de l’organisme - de 90 à 120 minutes - suivies chaque fois d’une période de repos d’activité biologique - de 20 minutes environ -. Nous pouvons tous repérer dans notre journée des moments où nous sommes très actifs, suivis de périodes où nous ressentons le besoin de relâcher notre attention, de nous étirer, de nous laisser aller à la rêverie, voire de dormir. C’est un moment idéal pour pratiquer la technique et la mettre en phase avec nos rythmes biologiques.
Ensuite, il faut établir un pont entre l’inconscient et le conscient. La respiration est le seul mécanisme biologique qui soit à la fois automatique (inconscient) et volontaire (conscient). Le stress fait s’accélérer la respiration et la rend superficielle ; par contre, lorsqu’on la ralentit consciemment et qu’on la rend plus profonde, tout le métabolisme est affecté positivement. C’est pourquoi la respiration est l’élément de base de pratiquement toute technique de relaxation. C’est aussi la voie royale pour établir le lien entre les pensées conscientes et l’inconscient, et c’est justement l’inconscient qui préside majoritairement à notre comportement quotidien.
Le stress, phénomène de société, a pris une telle ampleur qu’aujourd’hui plus personne ni plus aucune institution ne peut le négliger, sous peine de souffrir de graves dysfonctionnements.
Les sources de stress sont multiples mais la réponse de l’organisme doit toujours rester la même : maintenir l’équilibre psycho-physiologique face à la pression extérieure. Par une pratique quotidienne de gestion du stress, qui soit à la fois facile, adaptable à toutes les situations de vie et qui ne demande que quelques minutes à chaque fois, il nous est possible à tous et à toutes d’appréhender le stress de cette vie avec beaucoup moins de peur et plus de bien-être, tant physique que mental.
Daniel Collet-Cassart
Daniel Collet-Cassart est Psychothérapeute Gestaltiste, formé en psychotraumatologie et travaillant en EMDR, par VISIOCONFERENCE uniquement. Membre EMDR-Belgium et EMDR-France. Je reçois les adultes et les couples.
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