Dossier

Psychothérapie et thérapies alternatives

Entretien avec le Professeur Ernest Haron.


Eminent chercheur en sciences humaines, le professeur Haron initialement docteur en mathématiques , ancien chercheur et enseignant des universités d’Oxford et de Berkley (USA) étudie depuis les années 60 les thérapies alternatives et la psychothérapie. Anglais et européen convaincu, il réside très souvent en France.Sa vision de l’évolution de la « thérapie de la personne » est édifiante .Elle est précise, claire et synthétique (dans ce domaine où règne beaucoup de confusions). Maîtrisant bien notre langue le Pr Haron connaît très bien les auteurs américains et européens(dont les principaux ouvrages ornent sa bibliothèque).

Entretien réalisé par Pierre Pastel, chercheur à l’université de Saint-Denis, psychothérapeute et sociologue.

Pierre Pastel :
Qu’est-ce qui caractérise le plus l’évolution actuelle de la « thérapie de la personne », comme vous aimez l’appeler ainsi ?.Pourriez-vous nous décrire les principaux aspects de cette évolution ?

Pr.Haron
Vous m’invitez à pratiquer une acrobatie ! La thérapie de la personne est en pleine mutation. Et il y a, comme le signale Edgar Morin, dans cette mutation, à la fois progression et régression.Il est, en dépit des apparences, très difficile pour la plupart des gens de comprendre rationnellement le comment et le pourquoi de ce qui se passe.

En ce qui concerne les aspects positifs de l’évolution dans ce domaine, ils sont caractérisés par : le retour à un certain bon sens, le souci du résultat, l’ouverture progressive par rapport à d’autres approches que celles académiques très souvent réductionnistes, l’accroissement du nombre de praticiens de toutes catégories(y compris de formations médicales )qui utilisent des méthodes appelées alternatives( visant l’exploitation des capacités naturelles humaines), la remise en cause des formations universitaires qui paraissaient et qui paraissent toujours actuellement dans la majorité des cas comme des références les plus scientifiques, la transformation progressive des conditions de la formation des futurs praticiens….

Pierre Pastel :
Quels types d’arguments scientifiquement fondés pourraient permettre une remise en cause de telle ou telle pratique et nous guider vers de nouvelles orientations ?

Pr.Haron :
Les observations et recherches se situent dans un contexte qui est plus ou moins chaotique. Des investigations des universitaires eux-mêmes aux USA mettent en cause la pertinence des études universitaires et l’efficacité des pratiques qui en découlent. Des évaluations réalisées le montrent. La littérature scientifique à ce sujet est peu nombreuse.Il existe quelques publications en français qui en rendent compte. Vous trouverez un compte rendu de ces évaluations dans le livre monumental du Professeur américain David Meyer, qui constitue une référence scientifique désormais classique.

En voici un extrait qui résume les conclusions des évaluations en question « Les gens qui envisagent une thérapie souhaitent également savoir quelle psychothérapie sera la plus efficace dans leur cas. La méta - analyse réalisée par Mary Lee Smith et ses collaborateurs (1977, 1980) a permis de comparer l’efficacité de différents traitements. Que pensez - vous qu’ils ont trouvé ? Un traitement particulier a- t -il obtenu les meilleurs résultats ? Les gens tirent-ils plus parti d’une thérapie de groupe ou d’un traitement individuel ? D’une thérapie prolongée ou de courte durée ? D’un traitement administré par un thérapeute expérimenté ou par un novice ?En dépit des affirmations de supériorité proclamées par les défenseurs des différents types de traitement, la comparaison des différentes thérapies effectuée par Smith n’a pas révélé de vainqueur évident. Aucun type de traitement ne s’est avéré significativement supérieur »

Par ailleurs bien avant ces conclusions Carl Rogers, chercheur universitaire qui le premier avait jeté les bases d’une évaluation des méthodes psychothérapeutiques avait bien souligné ces mêmes anomalies . En 1978 lors de son séminaire en Espagne, quand je l’interroge sur ses idées actuelles concernant les études psychologiques, il me confirme ce qu’il avait énoncé dans un congrès ,des années auparavant :« les étudiants, avait-il précisé, font des années d’études en psychothérapie. Leurs études mêmes créent couramment des blocages importants chez eux. Ces études doivent être transformées ».

Pierre Pastel :
Chacun comprendra qu’une majorité de professionnels et non professionnels trouvent ces conclusions pour le moins très étonnantes !

Pr.Haron :
Oui ! Mais l’étonnement est toujours à la base de toute vraie découverte. Le vrai savant s’étonne toujours !. Ceux qui sont très sûrs des « vertus scientifiques » de leurs connaissances ou approches ne s’étonnent de rien !(alors que l’essentiel des pouvoirs de guérison échappe à leur approche !). La sur-spécialisation, technicité (déshumanisation) des approches et le refoulement des intuitions des étudiants par un amoncellement de savoirs constituent un véritable endoctrinement qui empêche l’étudiant et le futur praticien d’ être créatif. Chacun est cantonné dans une vision ou dans un protocole qu’il croit cohérent et rationnel.Aux USA dans de nombreuses universités on enseigne et pratique des méthodes parallèles comme le Shiatsu, les approches chinoises, la visualisation , la méditation yogi etc…), selon la revue « psychologies » qui a réalisée une enquête aux Etats-Unis ; Dans dix des plus grandes facultés de médecines des USA, on pratique la visualisation et la méditation pour augmenter les défenses immunitaires .

Dans le même temps aux Etats-Unis, beaucoup d’étudiants et d’ universitaires croient que les approches cognitives et comportementales(qui dominent actuellement dans les universités) sont les plus scientifiques !
Alors qu’en aucune manière ces méthodes(critiquées par des auteurs de renom)ne sont plus scientifiques que par exemple telle ou telle approche spirituelle ! Les évaluations comme celles résumées par le pr.Meyer ont été réalisées auprès des praticiens qui ont été formés par des études classiques universitaires arbitrairement considérées comme plus scientifiques….
En effet dans un grand nombre de cas des pathologies mêmes graves, des méthodes appelées « parallèles » ont été plus efficaces. Prenons le cas de la boulimie et l’anorexie (dont environ 20% des patients décèdent). On a observé dans un grand nombre de cas, des personnes se sortir de ces pathologies grâce aux approches appelées parallèles, alors que la thérapie classique la plus prisée dans les centres hospitalo-universitaires(thérapies cognitives et comportementales) n’avait rien donné.Ces cas sont nombreux dans la presse mais introuvables dans les études classiques et les revues spécialisées .
A titre d’exemple(édifiant) : un de ces cas graves d’anorexie/ boulimie a été rapporté par le « Magazine psychologies » qui n’est pas une revue pour spécialistes mais un magazine pour le grand public : une patiente gravement atteinte, avait été traitée par un des plus célèbres spécialistes comportementalistes en France.
Le résultat avait été un échec total. Elle part en Inde, apprends en quelques semaines une méthode de méditation avec une approche très simple basée entre autre sur la prise de conscience sensorielle de certaines parties ; spécialement olfacto-nasales de son corps… Elle en sort guérie .
Depuis elle pratique cette méditation et sa vie ainsi que sa perception d’elle-même ont changé. Il est possible d’essayer de comprendre pourquoi et comment cette méthode a été si efficace (disons à titre d’exemple et en passant que le boulimique et l’anorexique intègrent dans leur système défensif de raisonnements, toutes les explications données par les psychologues !, sans changer véritablement et en renforçant même leur carapace mentale .Le travail sur le plan sensorio-émotionnel (où réside l’essentiel de leur problème)et contre l’hyper-intellectualisation qu’a constitué cette méthode méditative a été un excellent remède pour cette patiente.Ces méthodes sont proclamées arbitrairement « parallèles » alors qu’elles sont au cœur même de la thérapie.Les recherches universitaires sur la thérapie de ces problèmes sont abécédaires, et réductionnistes.
On confond la recherche véritablement scientifique pour la guérison (qui demande beaucoup d’ouvertures d’esprit),avec des protocoles pour « gérer une thérapie » c’est à dire accomplir une tâche professionnelle(dont beaucoup d’approches sont pratiquement exclues). Ces patients boulimiques et anorexiques vivent très souvent des phases de rémissions en restant fondamentalement fragiles.
Ces thérapies classiques-l’expérience le montre- n’aident pas davantage à vivre cette rémission que bien d’autres activités pourraient le permettre(comme le sport bien organisé dans un cadre agréable et chaleureux avec partages et explications).Ce qui est important c’est de sortir de ces carcans et d’aller vers d’autres voies d’approches. En France, également on peut observer dans cette évolution de la « thérapie de la personne » les mêmes paradoxes soulignés par Ed.Morin (progression et régression en même temps !).

A titre d’exemple : la méthode de Carl Simonton pour la thérapie psychologique et globale des maladies telles que le cancer, est bien appréciée par beaucoup de praticiens voire même quelques universitaires (rares) de haut niveau. Ainsi son livre « guérir envers et contre tout »(4) qui a fait le tour de la terre est préfacé par un professeur de médecine ( et membre de l’académie de médecine) et un professeur de psychologie. Alors que dans le même temps cette méthode est exclue des enseignements universitaires et dénigrée par ceux qui croient leur pratiques plus scientifiques( à cause de leurs préjugés induits par leurs études).
Or, la pratique du yoga, de la sophrologie,la visualisation ou de toutes autres méthodes de développement personnel pourraient être intégrées très judicieusement dans l’ approche de Carl Simonton (basée à tous les niveaux sur le bon sens et préconisées par d’éminents scientifiques comme le professeur Albert Ellis ou le professeur de psychiatrie Maxie .C. Maultsby aux USA)

Pierre Pastel Selon ces évaluation , la durée des études importerait peu !?

Pr.Haron
Il faut comparer ce qui est comparable. La durée (comme le volume) de ce qui peut-être enseigné est très relatif ! Ici nous sommes dans la « thérapie de la personne » et non pas dans le traitement médical où il faut un savoir technique et matériel précis. Aujourd’hui si j’ai une infection j’irais voir un médecin et absorberais tel ou tel antibiotique. Si je souffre d’une tumeur je me la ferais enlever par un très bon chirurgien qui maîtrise la technique. Mais dans le cadre de la thérapie de la personne, c’est la nature du traitement qui est importante.
Beaucoup de méthodes et d’approches sont marginalisées de façon arbitraire .Par exemple on a pu obtenir d’excellents résultats avec la visualisation associée avec la yoga-thérapie dans le cadre des « dépression majeure d’intensité moyenne » (c’est-à-dire la majorité des cas de dépression entraînant la prescription des drogues antidépresseurs). On a obtenus des résultats nettement supérieurs avec moins de rechutes.
Mais ces méthodes qui peuvent être même justifiées ou soutenues par des arguments scientifiques( basés entre autre sur le fonctionnement du cerveau et des capacités naturelles qu’il recèle) ne sont pas étudiées,alors que leur étude aidera beaucoup à une réforme importante des thérapies en question .

Dans les années 70 aux USA quelques milliers de thèses et mémoires universitaires avaient été consacrés à la méditation (que pratiquait un grand nombre d’américains). Les résultats de cette pratique ont été très positifs (y compris au niveau biologique) dans de nombreux cas on a constaté même des guérisons frôlant le miracle. Quant à la durée des études le professeur Albert Ellis psychothérapeute 96 ans, référence scientifique la plus citée dans les travaux universitaires américains, forme les gens à la relation d’aide psychologique en trois modules.Chacun de ces modules comportant 4 jours.

Les deux premiers modules sont ouverts à tous ceux qui souhaitent travailler dans la relation d’aide thérapeutique. Parmi les stagiaires on trouve aussi bien des médecins que des soignants ,des artisans ou des patients .Nous offrons aussi , ces modules dans le cadre de l’ « Université européenne ».Ces modules sont ouverts à tous(6).Cette Université est la seule qui réalise une formation diplômante en quelques week-ends intensifs (avec quelques enseignements par correspondance ) sur ces sujets .Et tous ceux qui sont déjà engagés dans une quelconque thérapie (alternative ou non) en sont enchantés ,car elle réalise une synthèse des fondements(physiques, psychologiques, spitrituels, énergétiques, etc…) de la « médecine globale de la personne ».

Qu’est-ce qu’une licence en psychologie ?Elle comporte 3 années d’études .Des volumes importants de cours sont consacrés à l’anatomie, à la biologie, aux mathématiques, etc… Qui ne servent pas à grand-chose pour comprendre les souffrances « humaines » telles que dépressions, phobies, boulimie, etc…
Par contre ces savoirs imposés à l’étudiant créent l’illusion que leur approche est scientifique !
Alors que l’écoute de la personne ou la question de comment utiliser un talent, un art, ou une démarche (la musique, l’expression corporelle…) Pour harmoniser les énergies, le vécu, etc… n’ont pas grand chose à voir avec ces connaissances. Alors l’étudiant formé par ces enseignements classiques a tendance à devenir méfiant(au lieu de devenir enthousiaste et confiant pour agir d’une façon ou d’une autre) .Par ailleurs dans les institutions de soins, la relation thérapeutique est aseptisée et devient de ce fait largement inauthentique. Le thérapeute conserve son masque et génère des illusions qui viennent s’ajouter à celles du patient qui en souffre(le patient aussi ,à l’instar de l’étudiant va croire dans des attitudes thérapeutiques qui sont de nature à rassurer plutôt le thérapeute).Cette notion d’enthousiasme qui va de pair avec le réveil des intuitions naturelles de l’étudiant est essentielle .
Ces intuitions ont été à la base de la création des méthodes de développement personnel (qui toutes ,ont été créées en dehors du cadre des thérapies officielles).

Pierre Pastel :
Comment faut-il envisager dans ces conditions une réforme de la formation en la matière ?

Pr.Haron :
La réforme de la formation est la clé d’une évolution positive. Cette question est abordée depuis une trentaine d’années en France par quelques praticiens et chercheurs universitaires .Ils se sont réunis au sein d’une université européenne que vous connaissez et à laquelle je collabore. Plusieurs idées servent de fil conducteur à ces recherches. Ces idées ont été notamment développées,et expérimentées dans des formations polyvalentes par le Dr. C. Irampour à savoir : il est évident que dans la thérapie de la personne un homme devient un remède pour un autre. Tout homme est un thérapeute en puissance, c’est-à-dire qu’il peut si il le désire (question de motivation !) aider par un biais ou un autre, une autre personne . Il y a en chacun de nous une séries d’ intuitions naturelles dans ce domaine (refoulées ou distortionnées par des enseignements oui des dogmes qui ne conviennent pas).

Ces intuitions se situent à deux niveaux :
- 1/ la compréhension, la perception de la personne en tant qu’être humain (par des paradigmes tels que l’énergie, le comportement, l’émotion, ou l’être spirituel,etc…) et non pas comme un amas de molécules.
- 2/ l’intuition qu’a le candidat concernant les « moyens » (la solution) pour aider à la libération des capacités naturelles des hommes.Les diverses approches (psycho-corporelles, spirituelles, énergétiques,…) correspondent à telle ou telle sensibilité/intuition. C’est cette intuition individuelle qu’il faut savoir libérer par la formation.

Tandis que les études classiques imposent à tous, les mêmes unités d’enseignements (très souvent disparates) et refoulent ainsi l’intuition de chacun.Pour une formation cohérente il faut réaliser une synthèse réellement holistique harmonisatrice des connaissances. Alors on se rendra compte du pouvoir libérateur de l’enseignement qui accroît considérablement la créativité du futur praticien et sa confiance en lui. L’enseignement doit être ainsi libérateur pour l’étudiant lui-même. C’est donc la nature de la synthèse qui compte et ses vertus libératrices et non pas le volume du savoir enseigné ni spécialement la durée. Il faut que cette synthèse puisse par ailleurs intégrer les fondements (énergétiques, psychosomatiques, spirituels, etc…) de la personne (globale) et par là-même pouvoir englober les diverses méthodes, parallèles ou non dans l’approche globale de la personne.

L’Université européenne en question est la seule à proposer une telle synthèse qui ramène tout à l’unité de la personne.

Pierre Pastel :
Comment voyez-vous l’avenir de la "thérapie de la personne"

Pr.Haron
Il parait évident que dans toute thérapie de la personne l’essentiel consiste dans l’exploitation des ressources naturelles de l’individu pour l’aider à surmonter ses difficultés.Ces capacités naturelles sont considérables .Les thérapies habituelles puisent très peu dans ces potentiels humains. Et nos sciences modernes en savent très peu de choses. J.P.Escande, professeur de médecine souligne très bien cette réalité quand il écrit : « l’organisme, sur ordre du cerveau, possède en lui de quoi corriger tous les désordres possibles(…) Ces capacités de défense et de régénération sont, pour le moment, quasi inexploitées ».

Cela nous amène à la notion des thérapies naturelles. Actuellement la demande de prise en charge par ces thérapies s’accroît régulièrement .Dans nombre de cas le recours à ces thérapies a été une véritable révélation pour la personne. Il y a une logique naturelle tant biologique que psychologique ,liée aux potentiels humains dont le développement fonde notre espérance face aux souffrances humaines qui ne cessent de s’accroître

L’avenir réside dans le plein emploi des potentiels humains.

Info : pro-sciences@wanadoo.fr

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